Junte de Kati-M5-RFP : l’heure des retrouvailles

Le M5-RFP et le groupe de militaires (ex Cnsp) ont d’évidentes raisons de vouloir se partager la paternité de la victoire sur IBK et son régime qu’ils ont un temps cru pouvoir filer le parfait amour. Mais, à l’épreuve du pouvoir, les divergences avaient pris le pas sur la volonté de cheminer ensemble. Après des longues péripéties, l’heure semble aux retrouvailles entre les deux structures avec la proposition du Colonel Assimi Goïta de confier le poste de Premier Ministre au M5-RFP (Mouvement du 5 juin pour le rassemblement des forces patriotiques). C’était au cours de leur rencontre de la junte avec la classe politique, le vendredi dernier.

Le premier poste de la Primature reviendra au M5-RFP. Le mouvement de contestation qui a été à l’origine de la chute du régime d’Ibrahim Boubacar Kéïta, mais qui est resté opposé à la Transition depuis la mise en place des organes de cette Institution. Le Chef de l’ex junte l’a confirmé, le vendredi dernier, devant les Représentants des partis politiques.

Le choix de Choguel Kokalla Maïga comme Premier Ministre serait très judicieux tant il aura fait preuve de vision, de rassemblement, de dynamisme et de cohérence et le tout avec une rigueur et une constance hors du commun tout au long du combat pour le changement du M5- RFP.

En effet, Dr Maïga a été à la pointe de la contestation contre la mauvaise gouvernance de l’ancien Régime. Le Président du Comité stratégique du M5- RFP n’a cessé de dénoncer la mauvaise gouvernance et le gouffre dans lequel IBK et son Régime avaient plongé le pays. Ce combat a finalement abouti, le 18 août 2021, avec le départ d’Ibrahim Boubacar Kéïta.

Après l’installation des Autorités de la Transition et face à la tournure que prenait la direction de la donne politique, Dr Choguel n’avait pas hésité à monter au créneau pour prévenir des risques d’impasse sur le chemin emprunté par les Autorités de l’époque. Et il ne s’est pas simplement contenté de dénoncer. A l’appui, il proposait toujours des pistes de solutions à travers des déclarations du M5 dont, entre autres : « La création d’un organe unique et indépendant de gestion des élections ; la relecture de l’Accord de paix ; la réduction du train de vie de l’Etat par un changement volontariste de la gouvernance des affaires publiques ; la mise en œuvre des audites attendues des Institutions et des financements publics… ». 

Rassemblement du 4 juin

Par ailleurs, après plusieurs jours de tergiversations autour du motif de la manifestation du 4 juin, le M5-rfp a précisé que l’objet de son grand meeting sera consacré plutôt à la commémoration de la date anniversaire du mouvement, créé le 5 juin 2020. Ainsi en a décidé le Comité stratégique du M5-rfp, dans un communiqué : « Dans le cadre de la commémoration du premier anniversaire du Mouvement du 5 juin Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-rfp) du 5 juin 2020, le Comité Stratégique du M5-rfp lance un appel à toutes les Maliennes et à tous les Maliens favorables au changement à se rassembler au chevet de la mère patrie… ».

Cependant, au lendemain de la chute du Régime d’IBK, les journées des 10, 11 et 12 septembre 2020 avaient ainsi consacré le divorce entre les deux camps (CNSP et M5). La colère, on le comprend, était plus vive chez le M5-rfp qui se considère floué à juste raison. C’est lui qui a déclenché la lutte, le 5 juin 2020, avec une opiniâtreté qui lui a valu 23 martyrs et 150 blessés, selon le mouvement. S’il ne s’était pas attaqué farouchement à la citadelle IBK, le pronunciamiento des colonels n’aurait certainement pas pu advenir, encore moins la naissance du Cnsp.

Une certitude : dans la plupart des insurrections populaires enregistrées dans l’histoire, le dernier mot revient toujours à l’Armée, en tant qu’arbitre volontaire, involontaire ou forcé carrément. Ce qui est arrivé au Mali, le 18 août 2020, ne déroge pas à cette constance. Les militaires eux-mêmes ont vite reconnu, trois jours après leur coup, le vendredi 21 août, à la célèbre Place du monument de l’Indépendance nationale, qu’ils n’avaient fait que parachever la lutte du M5-rfp et qu’ils n’entendaient pas s’éterniser au pouvoir, qu’ils le remettront au plus vite aux civils. De quoi rassurer les Politiciens pour qui ces assurances données par les galonnés pouvaient être prises pour paroles d’Évangile.

Mais les choses ne se passeront pas ainsi. Au grand désappointement du M5-rfp, les Officiers recevront en premier lieu les partis politiques de l’ancienne mouvance présidentielle ; c’est-à-dire, le camp qui, jusqu’au 17 août, disait défendre IBK et son Régime. Donc, ceux qui s’opposaient à tout changement. À ce crime de lèse-majesté commis par le CNSP s’est ajouté la promulgation, par sa publication dans le Journal Officiel de la République, de son Acte fondamental pris par les militaires, le 24 août, soit juste trois petits jours après leur proclamation publique faite devant le monument de l’Indépendance, le 21 août. Or, les Hommes du CNSP avaient reçu le M5-rfp, le 25 août, sans leur parler de leur Acte fondamental pris un jour avant, le 24 août, et qu’ils rendront public le 27 août. Cette fréquence de trois jours et les dissimulations qui allaient avec intriguaient déjà beaucoup d’observateurs avertis de la vie politique malienne.

En tout cas, avec cette décision de confier la Primature au M5, Kati pose déjà les jalons d’une « vraie » retrouvaille. Comme on aime aussi à le dire souvent : « Après la pluie, c’est beau le temps ! ». Alors, bon vent au M5 et au Président de son comité stratégique.

Mohamed Sylla

Source : L’Aube

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