Mali : plus de  309 015 manuscrits anciens de Tombouctou numérisés

Pour partager le bilan de la numération des manuscrits anciens de Tombouctou évacués à Bamako du 2014 au 2022, les responsables de l’ONG Sauvegarde et valorisation des Manuscrits anciens pour la Défense de la culture islamique (SAVAMA-DCI) et ses partenaires ont organisé 25 août 2022 une conférence de presse au Mémorial Modibo Keïta de Bamako.

Ladite conférence était animée par le président exécutif de SAVAMA-DCI, Dr Abdel Kader Haïdara. C’était en présence du représentant du ministre en charge de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme (MACIHT) ; des représentants des partenaires dont Hill Museum and Manuscript Library des Etats-Unis d’Amérique et la Fondation Gerda via l’Université de Hambourg (Allemagne).

L’initiative a permis de sauvegarder plus de 300.000 manuscrits anciens. Ces documents numérisés peuvent être consultés sans être soumis à des manipulations stressantes. Depuis l’exfiltration de ces manuscrits anciens à Bamako, l’ONG Sauvegarde et Valorisation des Manuscrits anciens pour la Défense de la culture islamique (Savama-Dci), en 2013, a entamé la numérisation de ces précieux documents. La crise de 2012 avait entraîné la destruction de certains manuscrits par des djihadistes. Il fallait donc commencer leur numérisation afin de les sauvegarder sur des ordinateurs et d’autres supports modernes.

Dans son intervention,  Dr Abdel Kader Haïdara a expliqué que dans ce travail, son organisation a été appuyée par le ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, mais aussi par des partenaires, notamment Hill Museum et Manuscrits Library (HMML) ; l’Unesco ; la Fondation Ford ; le ministère allemand des Affaires étrangères ; l’Union européenne ; les Fondations Doen et Prince Klauss des Pays-Bas et le Danemark. La conférence visait donc à porter à la connaissance du public les efforts déployés dans le cadre de la numérisation de ces documents dans le cadre d’un partenariat entre Savama-Dci et Hill Museum & Manuscrits Library.

Ce projet de dématérialisation vise à contribuer à la sauvegarde et à la conservation de cette mémoire ainsi que sa préservation, dans l’avenir,  contre d’éventuels dangers liés à des conflits internes ou à des crises. « La numérisation a révolutionné le monde et les pratiques professionnelles, particulièrement la gestion du patrimoine documentaire », a indiqué le conseiller technique au département en charge de l’Artisanat, Mahamadou Cissé. Pour les institutions patrimoniales comme les bibliothèques de manuscrits, le premier but de la numérisation, selon lui, est de contribuer à la conservation physique et la gestion des documents.

Selon le représentant du ministre en charge de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, techniquement, la numérisation est la conversion d’un signal analogique (livres, objets naturels) en signal numérique (une suite de nombres 0 et 1 composant les objets électroniques comme l’image ou la photo numérique…), au moyen d’un appareil (scanner, appareil photo numérique). Cela en vue d’automatiser le traitement de la ressource ou de la chose à numériser. En d’autres termes, c’est faire  en sorte que les ressources  matérielles comme nos manuscrits soient gérables par des machines (ordinateurs, téléphones…).

Une alternative au problème d’insécurité

C’est un procédé de dématérialisation des ressources en vue de leur faire bénéficier des avantages des nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic). Cela permet aussi d’automatiser et de faciliter toutes les activités autour des manuscrits : la conservation, le traitement, l’accès, l’échange, la diffusion, l’édition, la collaboration, etc… Pour les institutions patrimoniales comme les bibliothèques de manuscrits, le premier but de la numérisation est de contribuer à la conservation physique et la gestion des documents, a rappelé le conseiller technique.

« Les manuscrits sont nombreux et fragiles. Leur numérisation permet de produire une copie numérique permettant d’automatiser leur accès par les bibliothécaires, eux-mêmes, afin de faciliter leur contrôle, leur traitement et leur gestion, avant de les mettre à la disposition des lecteurs. À cet effet, il faut numériser les manuscrits et leurs instruments d’accès ou de recherche (catalogues) », a déclaré Mahamadou Cissé.

Selon lui, la manipulation peut endommager les manuscrits parce qu’ils sont fragiles. « La copie numérique est duplicable à l’infini et peut être consultée concomitamment en ligne par plusieurs usagers, depuis n’importe quel coin du monde. L’accès peut être aussi bien contrôlé », a-t-il ajouté. Il ressort des explications des spécialistes que la numérisation permet aussi de faire face à une demande de masse en fournissant à chaque utilisateur une copie de substitution pendant que les originaux sont à l’abri des manipulations stressantes.

« La conservation numérique est également une alternative au problème d’insécurité auquel les manuscrits sont exposés. La crise de 2012 a détruit des manuscrits. Certains étaient inédits et d’autres en copie unique. Si les documents détruits avaient été numérisés et stockés sur des serveurs quelque part hors de Tombouctou, nous en aurions au moins une copie (numérique) aujourd’hui », a souligné le représentant du ministre en charge de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme.

Dr Columba Stewart, directeur exécutif de HMML, dira que sa structure a déjà participé à la numérisation de 309.015 manuscrits anciens, soit un total de plus de 4 millions d’images, pour l’ONG Savama-Dci, l’Association Elit de Tombouctou et Elid de Djenné. C’est une institution qui a été fondée en 1965 par des moines bénédictins de l’Abbaye de Saint Jean à Minnesota (états-Unis d’Amérique) pour le microfilmage des manuscrits monastiques en Europe.

Ismaël Traoré / Afrikinfos-Mali