Situation sécuritaire en 2020 : les chiffres alarmants de Ocha

Dans un rapport annuel pour le compte de l’équipe humanitaire pays et des partenaires publié en février 2021, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) révèle que le nombre de déplacés est passé de 187 139 en octobre 2019 à 311 193 en octobre 2020, soit une augmentation de près de 40%.

Dans le même document, l’organisation internationale, précise que cette augmentation s’explique par la recrudescence de l’insécurité dans les régions de Ségou, Mopti, Tombouctou, Gao et Ménaka au cours des derniers mois, engendrant ainsi, de plus en plus, de déplacements dont 71% des cas sont liés aux conflits intercommunautaires et 28% aux conflits armés. « Comme en 2019, les régions de Mopti et Ségou ont enregistré la plus grande hausse des chiffres. Concernant le profil démographique des personnes déplacées, 55 % sont des femmes et 51% de la totalité représentent la population active. De plus, 41% des chefs de ménages des personnes déplacées internes (PDI) sont des femmes, 62% sont des enfants de moins de 18 ans et 2% sont des personnes âgées de plus de 60 ans. Par ailleurs, 44% sont localisés au niveau des familles d’accueil contre 56% localisés dans des sites spontanés (36%) ou dans des centres collectifs (18%), et 2% dans des bâtiments administratifs gouvernementaux. Enfin, 58% des PDI ont exprimé l’intention de retourner vers leurs zones d’origines »,peut-on lire dans le rapport.

S’agissant des enfants, OCHA estime qu’ils sont profondément affectés par la crise. Aussi, selon l’organisation internationale, les enfants figurent parmi les premières victimes avec des atteintes graves et répétées à leurs droits ainsi qu’une dégradation de leur état physique, émotionnel et psychologique. « En octobre 2020, on comptait 192 940 enfants en situation de déplacement forcé (ce qui représente 62% des PDI), un chiffre qui a plus que doublé en une année. Entre janvier et septembre 2020,  1 118 enfants non-accompagnés ou séparés (dont 414 filles) ont été identifiés par le Sous-Cluster Protection de l’enfant, un chiffre probablement largement sous-estimé au vu des défis persistants relatifs à la collecte des données », ajoute le document.

Un grand besoin d’appui en santé mentale et soutien psychosocial

Selon le rapport, les filles de moins de 18 ans représentent plus de 30% des personnes déplacées internes
et constituent ainsi la plus grande proportion de la population déplacée.

« Elles sont particulièrement exposées aux risques de violences sexuelles et basées sur le genre, y inclus de violences sexuelles. Ensuite, des besoins considérables en abris, Eau Hygiène Assainissement (EHA), vivres et Biens non Alimentaires (BNA), les filles et garçons en situation de déplacement forcé ainsi que ceux issus des populations locales affectées par ces mouvements (communautés hôtes) font face à un grand besoin d’appui en santé mentale et soutien psychosocial. Or ce besoin reste très largement non couvert, notamment du fait de l’absence d’acteurs spécialisés et du manque de structures de prise en charge de la santé mentale. Il est à remarquer que les jeunes filles présentent des besoins spécifiques en termes d’hygiène »,souligne le rapport.

Avec la dégradation de la situation de protection, précise le rapport, le  nombre de violations graves des droits de l’enfant  perpétrées par les parties au conflit a continué de s’accroître en 2020 avec 1013 incidents vérifiés pour l’année 2020. « Ces dernières années, les taux liés aux différents types de violations ont augmenté, à l’exception du viol et d’autres formes de violences sexuelles, qui, selon les estimations, seraient largement sous-rapportés. Cette recrudescence peut s’expliquer par l’intensification des conflits, en particulier dans les régions du centre, qui ont connu une détérioration drastique de la sécurité et humanitaire suite à l’escalade de la violence inter et intra-communautaire », peut-on lire dans le document.

1 064 867 de personnes dans le  besoin humanitaire en nutrition

Aussi, OCHA ajoute que le Cluster a estimé qu’en 2021 un total de 1 064 867 de personnes auront besoin d’une intervention humanitaire en nutrition, dont 356 512 personnes pour la prise en charge nutritionnelle curative : 157 782 enfants (77 235 filles et 80 547 garçons) malnutris aigus sévères (MAS), 200 730 enfants (96 585 filles et 104 145 garçons) et 19 015 femmes enceintes et/ou allaitantesmalnutries aiguës modérées (MAM) dans les cercles et régions en phase 3 ou plus de sévérité.

« Dans ces mêmes zones, 706 355 personnes auront besoin d’une prise en charge préventive sous forme
de distributions alimentaires ou transfert monétaire accompagné d’intervention d’Alimentation du Nourrission et du jeune enfant en situation d’urgenceet  dont 352 567 enfants (172 515 filles et 180 052 garçons) de 6 à 23 mois et 334 773 Femmes enceintes et/ou allaitantes. Faute de disposer de données précises sur la proportion de personnes vivant avec un handicap et l’impact de celui-ci sur la malnutrition au Mali, le Cluster nutrition estime cette proportion à 10% celle des enfants et 15% celle des Femmes enceintes et/ou allaitantes, soit environ 71 000 enfants de moins de 5 ans et 53 000 femmes »,précise le document.

Par ailleurs, ajoute l’organisation internationale, plus de 95% des personnes déplacées internes vivent dans les régions où l’accès à l’eau est inférieur à la moyenne nationale qui est de 68%. « La couverture en services d’assainissement de base était à 32,6% en 2019 et nécessitait une forte participation et contribution des ménages en vue de s’acheminer vers un accès universel aux services d’assainissement de base et éliminer la pratique de défécation en plein air. Selon, l’Enquête Modulaire et Permanente auprès des Ménages (EMOP), en zone rurale, le taux de défécation en plein air est de 15,4%. Cette situation aggraverait l’état nutritionnel des personnes les plus vulnérables (les enfants, les femmes enceintes et/ou allaitantes) »,ajoute l’organisation tout en rappelant que la malnutrition est liée à l’accès à l’eau, l’hygiène  et l’assainissement.

Ousmane BALLO

Source : Ziré