Sortie de crise : L’architecture de la transition sera discutée entre maliens

À l’issue de trois jours d’échanges, le Comité national pour le salut du peuple et la délégation de la Cedeao sont parvenus à des avancées significatives. Goodluck Jonathan devra rendre compte des résultats de sa mission aux chefs d’État qui se pencheront, demain, de nouveau sur la situation de notre pays

Rien n’est encore arrêté pour la transition, son architecture sera décidée entre Maliens, le président sortant Ibrahim Boubacar Keïta a démissionné de son propre gré et n’est plus intéressé par le pouvoir. Le désormais ancien président de la République peut être sécurisé dans un endroit de son choix et pourra aller se soigner et revenir quand il veut. Un sommet de la Communauté économique des états d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) est prévu ce mercredi pour plancher sur l’évolution de la situation politique au Mali et éventuellement, sur la levée ou l’allègement des sanctions. Voilà en gros, ce qui ressort des trois jours de discussions entre l’équipe de médiation de la Cedeao conduite par l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan et les membres du Comité national pour le salut du peuple (CNSP).

Hier, troisième jour des discussions entre le CNSP et le médiateur de la Cedeao, il y a donc eu des avancées significatives. C’est aux environs de midi que le médiateur Goodluck Jonathan a fait son entrée dans la cour du ministère de la Défense et des Anciens combattants. Auparavant, l’ancien président nigérian avait rencontré les membres de la Cour constitutionnelle. Une dizaine de minutes après son arrivée dans la cour du département en charge de la Défense, il sera rejoint par les membres du CNSP, avec à leur tête, le colonel Assimi Goïta.
D’entrée de jeu, le porte-parole du Comité, le colonel-major Ismaël Wagué s’est adressé à la presse pour démentir des rumeurs ayant circulé la veille concernant la transition.

«Je tiens à préciser qu’à ce stade des discussions, avec l’équipe de médiation de la Cedeao, rien n’est décidé. À aucun moment, on n’a parlé de gouvernement à majorité militaire ou quoique ce soit», déclarera-t-il, avant d’ajouter que toute décision relative à la taille de la transition, au président de transition, à la formation du gouvernement se fera entre Maliens avec les partis politiques, les groupes sociopolitiques, les syndicats, les groupes signataires, la société civile conformément à leur première déclaration. «Je tiens à rassurer les uns et les autres qu’aucune décision ne sera prise par rapport à la transition sans cette consultation massive», répétera le porte-parole du CNSP.

Les membres du CNSP et l’équipe du médiateur se sont retrouvés alors dans la salle de réunion pour des discussions à huis clos. Après plus de deux heures d’échanges, Goodluck Jonathan et son équipe sont sortis de la salle. L’ancien président nigérian confiera à la presse que les autorités militaires et la médiation se sont accordé sur un certain nombre de sujets. «Ce que nous faisons, c’est pour l’intérêt du Mali et de la Cedeao parce que ce qui touche le Mali affecte le reste de la Cedeao car les pays sont liés», a indiqué Goodluck Jonathan, rappelant que ce qui arrive au Mali n’est pas un cas propre et spécifique pour ce pays puisque c’est déjà arrivé ailleurs dans l’espace de la Cedeao. Et face à cela, l’organisation sous-régionale utilise le même format et la même démarche pour traiter ces différentes questions.

D’après lui, l’approche de l’organisation communautaire se fonde sur son Protocole additionnel sur la démocratie et la gouvernance. Goodluck Jonathan expliquera que la mission de la Cedeao a d’abord voulu comprendre le point de vue du président démissionnaire à qui elle a rendu visite, avant la rencontre avec le CNSP. «Nous lui (Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr) avons demandé qu’est-ce qu’il propose comme voie à suivre. Il nous a fait savoir qu’il a donné sa démission, qu’il n’a pas été contraint à le faire et qu’il n’a pas envie de revenir aux affaires non plus», a fait savoir Goodluck Jonathan, ajoutant que le souhait de l’ex-président est une transition pour permettre au pays de retourner dans un régime civil le plus rapidement possible.

SANS CONTRAINTE- Ensuite, le médiateur a déclaré que les échanges avec les autorités militaires ont porté sur la situation des détenus politiques. L’autre question évoquée, a-t-il fait savoir, est la structure et la durée de l’équipe de gouvernement intérimaire. Les deux parties ont échangé sur le Protocole de la Cedeao et Goodluck Jonathan a précisé que l’organisation sous-régionale ne viendra rien imposer au peuple malien.

«Que ce soit un gouvernement élu ou transitoire, la décision revient au peuple malien. Mais le devoir de la Cedeao est de faire comprendre à tous qu’il y a un protocole qui régit la région. Et lorsqu’on se trouve dans une situation anormale, ce protocole s’applique», a expliqué Goodluck Jonathan qui rendra compte aux chefs d’État de la Cedeao qui se réunissent demain pour se pencher à nouveau sur la situation dans notre pays.

De son côté, le colonel-major Ismaël Wagué a confirmé que l’ancien président, Ibrahim Boubacar Keïta a clairement dit qu’il a démissionné sans contrainte. Le porte-parole du CNSP a révélé que l’ancien chef de l’État s’est dit soulagé d’avoir démissionné et a remercié les militaires qui sont venus le sécuriser pour qu’il ne soit pas violenté par la population qui était excitée contre lui.

D’après le colonel-major Wagué, Ibrahim Boubacar Keïta a également assuré qu’il n’a aucune intention de revenir au pouvoir. La Cedeao a demandé que les conditions de détention d’Ibrahim Boubacar Keïta soient allégées et qu’il soit autorisé à aller se soigner parce qu’il doit faire des contrôles médicaux, a-t-il précisé.
«Ce point a été accepté, donc il (Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr) peut être sécurisé dans un endroit de son choix et il pourra aller se soigner et revenir quand il veut», a fait savoir Ismaël Wagué, ajoutant que la Cedeao a garanti son retour en cas de besoin.

Le troisième point des discussions, soulignera-t-il, a concerné les conditions de sécurisation des autres personnes à la disposition du CNSP. «Nous avons dit que l’état actuel de la situation nécessite qu’elles soient sécurisées. Nous allons voir l’évolution de la situation et leur relaxe va dépendre de cela», a expliqué le porte-parole du CNSP. Parlant de la transition, le colonel-major Ismaël Wagué a confirmé qu’il y a eu des échanges à ce sujet.

Selon lui, chacun a donné son idée de la transition. Cependant, il a tenu à préciser que rien n’a été décidé. «L’architecture finale de la transition sera discutée et définie entre nous», a-t-il déclaré. Et au regard des efforts faits par les nouvelles autorités depuis la démission de l’ancien président, il a demandé la levée des sanctions prises par la Cedeao.

Dieudonné DIAMA

Source: L’Essor

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