Guinée: plusieurs dizaines d’opposants libérés

Un premier groupe de plusieurs dizaines d’opposants au président guinéen déchu Alpha Condé, détenus à la prison civile de Conakry, a été libéré hier en début de soirée. Parmi eux : Abdoulaye Bah (UFDG), Etienne Soropogui (Valeurs Communes), Ismaël Condé (maire adjoint de Matam), Kéamou Bogolan Haba (porte-parole de l’Anad, alliance d’une cinquantaine de partis politiques qui soutiennent l’opposant Cellou Dalein Diallo), ou encore Foniké Mengué, sorti lui de l’hôpital.

Après le rendez-vous manqué de lundi, celui de mardi fut le bon. En début de soirée, Abdoulaye Bah, de l’UFDG, et ses compagnons d’infortune franchissent un à un le portail de la prison civile de Conakry. « Nous sommes libres aujourd’hui, la liberté n’a pas de prix, c’est une nouvelle naissance quand on quitte la prison. C’est une joie d’être parmi les siens, j’estime que c’est une épreuve dans ma vie, et par conséquent je n’ai de haine contre personne », confie Abdoulaye Bah à RFI.

Bogolan Keamou Haba est le porte-parole de l’Alliance nationale pour l’alternance et la démocratie (Anad), une organisation d’une cinquantaine de partis politiques, de la société civile et d’ONG qui soutiennent l’ancien premier et leader du principal parti d’opposition au régime de l’ex-président d’Alpha Condé. C’est l’un des premier prisonniers à avoir été libéré hier soir. il se confie à son tour :

« Je suis le dernier prisonnier, arrêté le 14 juillet, d’Alpha Condé […] Le peuple de Guinée a demandé que le troisième mandat soit réversible et évidemment le troisième mandat est devenu réversible, c’est la victoire que nous avons remporté ensemble. Maintenant qu’Alpha Condé est parti, il faut ouvrir rapidement le dialogue. Et nous demandons à chacun d’accepter de s’unir parce qu’il faut servir la nation », Bogolan Keamou Haba

Ismaël Condé, incarcéré par le régime déchu, félicite les nouvelles autorités auxquelles il demande de faire rêver la Guinée. « Nous espérons que les autorités militaires sont venus avec de bonnes intentions, nous voulons les croire sur ces bonnes intentions, que ce départ soit enfin une nouvelle ère pour la Guinée. Qu’au moins ce carrefour vers lequel nous tendons ne soit pas encore un rendez-vous manqué pour l’histoire », implore-t-il. «Nous osons croire à eux, nous osons croire à la Guinée et croire enfin à une Guinée, libre, démocratique et prospère », conclut-il.

L’imam de Wanidara, El-hadj Abdoulaye Baldé, écroué depuis octobre 2020, formule des vœux et des prières pour le succès des nouvelles autorités : « Nous sommes très contents de l’armée guinéenne, nous sommes très contents du colonel Mamadi Doumbouya et son équipe, nous prions Dieu qu’il les montre le bon chemin. »

Foniké Mengué acclamé.

Tout cela s’est déroulé sous la supervision des colonels Balla Samoura et Moussa Tiègboro Camara, tous deux membres de la nouvelle junte.

Foniké Mengué, figure du FNDC (Front national pour la défense de la Constitution) est également libre depuis hier soir. Il était derrière les barreaux depuis un an. La libération du militant a provoqué des explosions de joie dans les rues de la capitale.

Contrairement aux autres prisonniers politiques, c’est de l’hôpital Ignace Deen, où il était hospitalisé depuis un mois, qu’Oumar Sylla alias Foniké Mengué a retrouvé sa liberté, en début de soirée. Les partisans du Front national pour la défense de la Constitution acclament leur héros, avant qu’il ne s’engouffre rapidement dans un véhicule. À travers le toit ouvrant, le militant salue une foule débordant d’allégresse qui ne cesse de s’accumuler autour du 4×4 pris dans un interminable cortège de motos.

Il faudra deux heures pour rejoindre le carrefour de Bambéto, lieu symbolique de la contestation contre le président déchu Alpha Condé. Derrière ses célèbres lunettes noires, le drapeau guinéen sur les épaules, Foniké Mengué harangue ses supporters réunis par milliers : « Notre combat contre le troisième mandat a abouti ! out ce temps que j’ai fait en prison, je n’ai jamais douté de notre victoire. C’est vrai que la prison est difficile. Mais je suis resté moi-même parce que vous, peuple de Guinée, vous ne m’avez pas abandonné. Cette victoire est notre victoire : soyons-en fiers ! »

Le militant du FNDC appelle à une marche pacifique en hommage aux martyrs samedi prochain, en collaboration avec les partis d’opposition. Tout en précisant qu’elle accompagne le processus de transition aux côtés des putschistes du CNRD.

Les avocats des détenus affirmaient hier qu’une liste de 79 personnes libérables avait été approuvée après des consultations entre eux, les nouvelles autorités et l’administration pénitentiaire.

Réunion de la Cédéao ce mercredi : des sanctions vont tomber

Dimanche, la Cédéao avait condamné la prise de pouvoir par les militaires et l’arrestation du président Alpha Condé. Dans son communiqué, l’organisation sous-régionale avait exigé le retour à l’ordre constitutionnel en Guinée sous peine de sanctions. Le pays n’y échappera donc pas : il devrait d’abord être suspendu temporairement de toutes les instances de la Cédéao. Le 30 mai dernier, le Mali avait subi la même sentence après un second coup d’État militaire en neuf mois.

« C’est le degrés de sanctions » qui sera en discussions ce mercredi, assure un ministre de la région. De quelle ampleur et de quelle nature seront-elles ? On se souvient que l’an passé, le Mali avait écopé de sanctions essentiellement économiques jusqu’à ce que les militaires s’engagent sur la voie d’une transition de 18 mois maximum.

Lors de ce sommet extraordinaire, les dirigeants ouest-africains pourraient également nommer un envoyé spécial ou un médiateur chargé d’entrer en contact avec les putschistes. « En général, on cherche parmi les anciens présidents disponibles », confie le même ministre. Parmi les noms qui circulent pour occuper le poste, celui d’Ernest Bai Koroma, l’ancien président sierra-léonais.

Une fois les décisions annoncées, l’Union africaine devrait emboîter le pas à la Cédéao et annoncer les sanctions prises contre le pays. L’UA pourrait elle aussi suspendre la Guinée de ses instances, comme elle l’avait fait pour le Mali début juin…

Source : RFI

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