Lutte contre le djihadisme : prétexte de la tentative de recolonisation de l’Afrique

Il y a des moments où, malgré le risque d’une assimilation de ses propos à un complotisme rédhibitoire, il urge de dénoncer  un mécanisme bien huilé qui consiste à inventer des  concepts pour justifier des agressions contre d’autres nations au nez et à la barbe de toutes ces organisations censées œuvrées pour la paix dans le monde.

Ainsi, des contrevérités  ont été concoctées par des officines appartenant aux puissances mondiales, vulgarisées par les médias à la solde de ces mêmes  puissances.

Pour le cas spécifique du Sahel, à longueur de journée, les médias mainstream et locaux, auxquels les premiers ont savamment imposé leurs narratifs, évoquent tantôt le terrorisme, tantôt le djihadisme dans le Sahel pour justifier leurs déferlements sur le continent. Ces mots, terrorisme et djihadisme, sont les équivalents  des « armes de destructions massives » de Saddam Hussein qui n’en avait pas, et de Mouammar Kadhafi  qui aurait tenté de massacrer son peuple. Nous l’avons vu, les deux ont été assassinés et leurs pays livrés à des hordes  de délinquants enturbannés et militarisés. Les deux substantifs ne résistent pas à une analyse élémentaire.

Le terroriste défend une cause qui lui paraît juste et dont la négation lui semble si insupportable qu’il prend des armes pour la défendre. Les exemples foisonnent  avec les « Action directe » en France, l’OLP de Yasser Arafat en Palestine, les Sandinistes au Nicaragua, la « Fraction armée rouge », bande à Baader en Allemagne…

On me rétorquera que, justement, les terroristes qui sévissent dans le Sahel défendent la cause de l’Islam par le djihadisme. Cette conception, quand bien même elle aurait été mise en place du vivant du prophète Mahomet, ne fut largement appliquée qu’à partir du califat de Umar Ibn Kattab.

Et dans le Sahel, particulièrement au Mali, nombre des spécialistes sur le terrain affirment que l’écrasante majorité  des personnes qui tuent, ravagent, incendient les récoltes et les villages ne connaissent rien du coran et de l’islam. Un spécialiste du terrain m’a certifié que 90% de ces soi-disant djihadistes terroristes sont loin de l’Islam.

Donc il s’agit de mercenaires payés pour semer le chaos. Qui leur donne les armes et l’argent demeure la question fondamentale. Oui qui les arme, les paye et leur donne des ordres ?

Bis repetita ?

On se souvient qu’au XIXème siècle, durant la conquête coloniale de l’Afrique, des armes modernes ont été livrées à certains Africains de l’Ouest qui, au nom d’une vision de l’Islam ont attaqué et affaibli d’autres rois africains. Ces djihadistes d’alors étaient suivis par les colons dont la tâche était facilitée par ces Africains qui s’étripaient joyeusement au nom de la religion.

Aujourd’hui la même recette est remaniée et mise en scène, notamment au Mali. Des mercenaires sont payés, Maliens et étrangers, pour semer le trouble et fragiliser le pays. Volontairement de nombreux jeunes appartenant à un groupe social sont recrutés pour créer la zizanie au sein de la société malienne en plus du mercenariat. Deux périls apportés concomitamment. Il n’y a pas longtemps, lors de sa visite en Guinée Bissau,  Emmanuel MACRO a essayé d’inciter à la guerre civile au Mali en inventant une haine contre le même groupe social au Mali, oubliant que les Maliens avaient compris la manœuvre qui a si bien réussi au Rwanda. Mettre les communautés nationales les unes contre les autres est, malheureusement, une marque de fabrique  de certaines  autorités françaises en Afrique: Rwanda, Cameroun, Nigeria, Algérie…

La menace terroriste aux frontières sud de l’Europe est un autre argument avancé par certains pays de ce continent pour justifier leurs interventions au Sahel. Même un simplet saurait dire que le Maghreb, située sur la façade sud de la Méditerranée est le premier point de contact entre l’Afrique et l’Europe. Il aurait donc été logique que l’armada européen et de l’OTAN se déploie sur cette entité septentrionale du continent.

Encore pire, depuis le 16 aout 2022, le Mali a demandé une réunion d’urgence du conseil de sécurité des Nations Unies pour apporter les preuves de multiples violations de son espace aérien par l’armée française, de la livraison d’informations et d’armes à des groupes de mercenaires. Trois après, les obstructions diverses et variées n’ont pas permis cette réunion. Cela a le mérite de nous enseigner et nous renseigner sur les maîtres du jeu à l’ONU.

Les Africains qui avaient mis de grandes espérances sur le droit international se réveillent  Gros*jean comme devant, groggy par la désillusion.

Pourtant les mensonges ventilés par les Nations Unies dans le cas de Laurent Gbagbo auraient  pu servir de leçon aux Africains: des militaires étrangers viennent arrêter un président africain pour le livrer à ses ennemis et le trimballer à la Haye pour un jugement qui a abouti à ce que nous savons tous. C’était une mascarade. Le procédé rappelle l’arrestation de P.E. Lumumba et sa livraison à ses ennemis qui l’ont assassiné avec ses amis politiques.

Les Africains ne veulent toujours pas comprendre une donnée simple. Dans certaines chancelleries, et depuis bien longtemps, on a scellé le sort de l’Afrique Sub-saharienne: elle doit rester le réservoir des autres au niveau des ressources. Les dirigeants africains doivent demeurer les obligés de telle ou telle puissance et s’ils s’y refusent, on le envoie à six pieds sous terre. On en a fait le seul des grands continents dont aucun pays ne dispose de bombe atomique. Juste un an  avant la prise de pouvoir par  Nelson Mandela en Afrique du sud en mai 1994, on a débarrassé le pays de son arsenal nucléaire avant 1993.

 

Officiellement, les pays disposant de la bombe atomique sont les suivants:

 

PAYS DISPOSANT DE LA BOMBRE ATOMIQUE
PAYS EUROPE ASIE AMÉRIQUE
ANGLETERRE X    
CHINE   X  
ETATS-UNIS     X
FRANCE X    
INDE   X  
ISRAEL   X  
PAKISTAN   X  
RUSSIE X    

 

Ce dispositif explique, en partie, les raisons excluant l’Afrique de facto  tout en faisant du continent le terrain de chasse des autres. L’argent et le canon sont les maîtres du jeu.

L’illustration de la puissance de l’argent est celle du Qatar. Le pays a financé la guerre et l’assassinat de Mouammar Kadhafi en Libye avec la conséquence que nous vivons dans le Sahel. Il a obtenu l’organisation de la coupe du monde qui s’y joue actuellement. Il finance les mouvements terroristes mais curieusement on n’en parle pas. De fait il aide l’Occident à déstabiliser une partie du monde par ses financements et, en contrepartie, on le laisse vaquer aux actes criminels et on vole à son secours dès qu’il y a péril.

En définitive, toutes ces théories vaseuses sur le terrorisme islamiste et le djihadisme ne sont que des trompe-l’œil grotesques utilisés pour recoloniser.

Cette fois, de nombreux peuples africains ont décidé de soutenir les dirigeants qui ont osé refuser  le nouveau diktat que l’on veut imposer à l’Afrique. Le Mali est devenu le symbole de refus de rester la vache à lait de l’occident pour les ressources.

Dans le jeu macabre pour faire plier le Mali tous les pays occidentaux font rang d’oignon derrière la Macronie.

Pour ses intérêts égoïstes, peut-on indéfiniment semer la misère et la désolation chez les autres?

Oui et oui pour la capitalisme, responsable des guerres mondiales, des génocides entre autres crimes contre l’humanité. Même Hitler est le fruit du traité de Versailles concocté par les puissances occidentales aux lendemains de la première guerre capitaliste mondiale. L’humiliation et la sévérité des sanctions infligées à l’Allemagne ont donné du grain à moudre au nationalisme hitlérien.

L’occident se permet tout parce qu’il a gagné la guerre de la désinformation et de la manipulation des  masses. Simplement, il n’est dit que le monde s’éternisera dans cette torpeur, ces informations mensongères.

Les grands médias sont inféodés à des Etats comme l’AFP, Reuters, RFI, France24 ou à des grands capitaines d’industrie comme « lemonde », « libération ». Les univers d’informations tronquées qui ont convaincu le monde sur le militarisme contre le terrorisme en Afrique.

Al Qaida, Daesh, Al Nostra, Boko Haram… ne sont que des créations pour habituer le monde à l’existence d’un terrorisme djihadiste. A l’évidence, même certaines attaques attribuées aux terroristes en Occident ne seraient pas fortuites. Il fallait préparer l’opinion à la dangerosité des terroristes djihadistes afin qu’elle accepte toute idée avancée au nom de la lutte contre ce fléau.

Le fait est qu’à travers  l’utilisation de rhétoriques allant de la lutte contre Daesh, Al Qaida et autres la volonté est d’imposer d’autres armées en Afrique dans les zones où se trouvent les ressources convoitées. Ainsi on fait d’une pierre deux coups: s’accaparer des ressources et empêcher les adversaires commerciaux et politiques de s’en approcher.

Le Mali n’a ni problème de djihadisme, ni problème de terrorisme classique. Des voyous criminels, âpres au gain, fusse-t-il sanguinolent, sont formés, équipés, renseignés, payés pour ce dessein funeste consistant à massacrer les populations civiles ou les inciter à fuir pour occuper, piller…

L’Afrique est l’échiquier d’un jeu macabre. Il est vital que les Africains, les peuples africains, aient la main. Sinon, comme pour la traite négrière, comme pour la colonisation on rédigera encore une histoire tronquée et absconse rendant les Africains responsables de ces crimes qui ensanglantes le continent.

Yamadou Traoré, Analyste politique

Source : L’Aube

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