La situation humanitaire dans notre pays est de plus en plus inquiétante. En effet, dans son dernier rapport, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations-Unies (Ocha) révèle que 6,8 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire, plus de 26 000 personnes sont affectées par les inondations. Aussi l’ONG humanitaire indique que la prise en charge des cas de violences basées sur le genre reste limitée dans les zones les plus affectées…
Selon l’Ocha, le nombre de personnes ayant besoin d’assistance humanitaire, cette année, est passé de 4,3 millions en janvier à 6,8 millions à la suite de la révision du Plan de Réponse Humanitaire (PRH) en août ; cela constitue une augmentation de plus de 58%, soit l’équivalent d’un Malien sur trois ayant besoin d’aide humanitaire. « Face à cette situation, les partenaires humanitaires, en coordination avec les structures étatiques, ciblent 5,5 millions de personnes correspondant à plus du double de la population ciblée au début de l’année. L’augmentation de la population vulnérable s’explique par la persistance des besoins humanitaires liés aux conflits auxquels se sont ajoutés ceux en lien avec la pandémie de COVID-19 dans un contexte marqué par la période de soudure ainsi que les conséquences des poches de sécheresse et des inondations saisonnières », précise l’ONG humanitaire.
Sur les 474 millions de dollars américains recherchés à travers le PRH révisé, 166 millions de dollars étaient mobilisés au 24 août 2020 ; soit un taux de financement de 35%. Le déficit de financement actuel s’élève à 308 millions de dollars : « Avec les fonds reçus, les partenaires humanitaires assistent les populations les plus vulnérables dans tous les secteurs de l’assistance. Dans ce cadre, plus de 873 000 personnes ont reçu une assistance alimentaire en juillet dans les régions du Centre ainsi que celles du Nord et dans la région de Kayes ».
Plus de 26 700 personnes sont affectées par les inondations
Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations-Unies souligne que les inondations ont touché environ 3 993 ménages, soit 26 711 personnes dont 5 400 personnes déplacées internes dans les régions de Gao, Mopti, Ségou, Kayes, Tombouctou, Ménaka et Kidal selon les données recueillies par les services techniques étatiques. Au total, 58% des personnes affectées vivent dans les régions de Mopti et Ménaka. « Les dégâts matériels engendrés par les inondations incluent la destruction de 1 460 maisons et de plus de 100 tonnes de vivres ainsi que la perte de 736 hectares de culture et de plus de 300 têtes de bétail.
En vue de faciliter une assistance rapide aux populations sinistrées, les partenaires humanitaires ont soutenu les directions régionales de la protection civile (DRPC) et du développement social (DRDS) dans l’exercice de mise à jour des plans de contingence », ajoute l’Ocha.
En outre, en appui aux efforts des autorités, les acteurs humanitaires ont assisté en vivres, en abris et en produits non alimentaires les familles les plus vulnérables. Ils contribuent également aux séances de sensibilisation sur les risques de propagation de la COVID-19 dans les lieux de refuge des personnes sinistrées (écoles, infrastructures étatiques, etc.).
Toutefois, il convient de préciser que cette assistance, poursuit-il, bien que cruciale pour sauver des vies et préserver la protection et la dignité des personnes sinistrées, reste insuffisante par rapport aux besoins croissants liés aux inondations.
D’autres interventions sont à prioriser afin de briser le cycle récurrent des inondations à savoir le curage des caniveaux pour l’écoulement des eaux de ruissellement, la construction des digues autour des agglomérations urbaines à risque et la sensibilisation de la population sur les risques de construire dans des zones inondables. Et d’ajouter : « Cette année, plus de 121 300 personnes, dont 44% vivant dans les régions de Kayes, Gao et Mopti, sont à risque d’inondations, selon les projections du plan de contingence national ».
Les violences basées sur le genre augmentent mais…
Dans son rapport, l’Ocha indique que la situation des droits des femmes et des filles a connu une détérioration due essentiellement à la dégradation du contexte sécuritaire observée depuis 2019 : « Le nombre de cas de violences basées sur le genre (VBG) rapportés est passé de 2021 cas de janvier à juillet 2019 à 2981 cas de janvier à juillet 2020 ; soit une augmentation de 47%. Ces données révèlent que 99% des personnes touchées sont des femmes et 36% des VBG sont des violences sexuelles. Selon le Système de Gestion des Informations sur les VBG (GBVIMS), l’année dernière 4 617 incidents ont été enregistrés, dont 97% des survivant(e)s étaient des femmes et 45% des filles de moins de 18 ans ».
L’absence d’une loi spécifique pour répondre aux VBG et la faible application des textes juridiques protégeant les femmes et les filles demeurent les facteurs contribuant à l’augmentation des cas.
Aussi, l’accès à une prise en charge holistique (services juridiques, psychosociaux, sanitaires, de protection, etc.) demeure problématique pour un grand nombre de personnes survivantes de VBG. Pour améliorer la réponse aux VBG, le sous cluster cible un million de personnes sur une population dans le besoin estimé à deux millions de personnes dans le Nord et le Centre du pays et a besoin d’un budget de 13 millions de dollars américains dont 2,3 millions sont déjà mobilisés.
Les membres du sous cluster ont maintenu l’offre de services dans le contexte actuel marqué par la pandémie de COVID-19. Cependant, en dehors de l’assistance psychosociale et médicale, d’importants gaps persistent dans la prise en charge.
L’assistance pour la réinsertion socio-économique et scolaire demeure le maillon faible de l’assistance avec 78% des personnes affectées par les VBG n’ayant pas accès à ce service.
Par ailleurs, l’analyse de la cartographie des services de VBG montre une capacité très limitée en termes de réponse dans plusieurs localités. Hormis l’appui psychosocial communautaire, ces régions ne disposent pas de service de prise en charge de VBG. Au total, 85% des localités sont concernées dans la région de Ségou, 80% dans la région de Kidal, 72% dans la région de Gao, 77% dans la région Tombouctou et 62% dans la région de Mopti…
Mohamed Sylla
Source : L’Aube