Élections au conseil national du patronat du Mali (CNPM) : la justice décide sans trancher

Les élections du Conseil national du patronat du Mali ont connu une prolongation judiciaire, à la suite d’un contentieux entre d’une part, la liste conduite par Mamadou Sinsy Coulibaly, le président sortant, et d’autre part celle de Amadou Diadié Sankaré. La décision tant attendue de la justice est tombée le lundi dernier, renvoyant les deux parties dos à dos. Un message fort qui met les patrons du Mali face à leurs responsabilités car devant comprendre qu’il n’appartient à la justice de leur choisir un président. A eux de s’entendre.

Les deux assemblées générales, notamment celles qui fondent l’argumentaire de chacun des protagonistes ont été purement et simplement annulées par la justice. En clair, c’est le retour à la case départ du processus électoral au Conseil national du patronat du Mali (Cnpm).

En faisant appel de cette décision, Amadou Diadié Sankaré est dans ses droits, mais surtout, étant déjà dans les locaux du Cnpm où il a été installé par une ordonnance gracieuse, il retarde ainsi son départ éventuel des locaux. En effet, les textes prônant que jusqu’à la mise en place du nouveau bureau, celui sortant reste en place, Mamadou Sinsi Coulibaly peut sur la base de cette disposition demander de reprendre la gestion du Cnpm.

On est donc loin de la sortie de crise car on risque d’attendre encore des mois, voire même plus d’un an pour que la justice se prononce de nouveau. Pendant ce temps, le Cnpm, déjà en lambeaux, ne pourra pas représenter à hauteur de souhait les opérateurs économiques dans les différentes instances où sont désormais prises les grandes décisions concernant l’avenir du Mali. Un avenir pour lequel les patrons du secteur privé ont un rôle important à jouer.

De toute façon, la décision rendue par la justice est comme un message que doivent décoder les deux camps en conflit, pour comprendre que la justice a fait ce qu’il fallait : leur dire qu’ils ont tous tort. En termes plus prosaïques, la justice les renvoie à leurs responsabilités de patrons qui doivent pouvoir s’entendre entre eux et ne plus se donner ainsi en spectacle, se crêpant le chignon pour des broutilles de strapontins. Quand les éléphants se battent, il y a certes trop de poussière, mais difficile de les séparer. En un moment donné, ils doivent arrêter, parce qu’ils vont se faire mal tous les deux et personne ne viendra à leur secours. Bien au contraire, affaiblis, ils sont la proie de prédateurs.

L’image est suffisamment forte pour interpeller les partisans de Mamadou Sinsi Coulibaly et ceux de Amadou Diadié Sankaré pour leur dire que le contentieux ne profite nullement au secteur privé, lequel est en train de rater un grand rendez-vous de l’histoire du Mali, notamment avec le processus de refondation de l’Etat enclenché par la Transition. La position de la Transition est connue : depuis l’arrivée de Choguel à la Primature, c’est une attitude de neutralité en se mettant à équidistance des deux camps. En pratique, cela signifie que le Cnpm reste isolé, tant que ce conflit ne sera résolu.

Pourtant, le sage Soya Golfa, le seul des fondateurs du Cnpm actuellement en activité, lors d’une conférence de presse pour annoncer l’initiative de mise en place d’une Commission de sortie de crise, disait : “Ce n’est pas à la justice de nous choisir un président. Il nous appartient d’accepter de nous asseoir, de nous parler et de nous écouter en mettant l’égo de côté, pour nous retrouver et prouver que nous sommes dignes de nous réclamer patrons du secteur privé du Mali”. Eh bien, l’histoire lui donne raison.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la reprise du processus électoral avec deux camps se regardant en chiens de faïence ne serait qu’un remake de la situation actuelle, le perdant pouvant prolonger le scrutin devant les tribunaux. Ce sera parti encore pour un long feuilleton judiciaire. Pendant ce temps, les affaires, elles, n’attendent pas et le Cnpm s’enlise, au risque de sombrer dans une marginalisation progressive.

Il y a donc lieu d’envisager une autre voie de constitution d’une liste consensuelle de bureau exécutif sans Amadou Diadié Sankaré et sans Madou Coulou. Connaissant ces deux-là, le Cnpm n’est rien pour eux et ne vaut pas de dépenser tant d’argent pour se bagarrer et prendre ainsi le risque d’inscrire leur nom comme fossoyeur de l’unité du secteur privé national. Si on met de côté l’égo on peut trouver une solution. Mais aussi fermer les oreilles pour ne pas écouter les oiseaux de mauvais augure et porte-carquois des deux camps qui attisent le feu parce qu’ils en sont les seuls gagnants : sous les noms de Mamadou Sinsy Coulibaly et Amadou Diadié Sankaré, des opérateurs économiques sans aucune représentativité, ne bénéficiant aucunement de la confiance des pairs pour espérer diriger le Cnpm, utilisent la stratégie de la terre brûlée pour avancer, masqués. Ils sont les seuls bénéficiaires de ce conflit.

En un mot comme en mille, Diadié et Coulou peuvent faire preuve de grandeur en se retirant pour faciliter les retrouvailles du secteur privé qui passeraient par une phase de transition, chargée de faire le toilettage des textes pour éviter pareil conflit. La résolution de la crise est à ce prix. Le cas de la Fémafoot, en tout cas, fait jurisprudence !

 Amadou Bamba NIANG

Source : Aujourd’hui-Mali

 

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