Mali: une table ronde sur la réparation de violences sexuelles

Global Survivor Fund (Fonds Mondial pour les Survivants), en collaboration avec les Avocats sans frontières Canada et le gouvernement du Mali à travers la Commission, Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR), a organisé une table ronde les 11 et 12 Novembre 2021 sur le statut et les opportunités de réparation pour les survivantes de violences sexuelles liées au conflit au Mali. La cérémonie d’ouverture a été présidée par le Lieutenant Colonel Fatoumata Bintou Sangaré , conseillère technique et représentante du ministre de la réconciliation nationale.

Le Fonds Mondial pour les Survivant(e)s est un mécanisme novateur, centré sur les survivant(e)s, dont la mission est de garantir l’accès à la réparation pour les survivant(e)s de violences sexuelles liées aux conflits à travers le monde, y compris là où les Etats ou les parties responsables de ces violences ne veulent pas ou ne peuvent pas garantir de réparation. Ainsi, le Fonds comble un vide identifié depuis longtemps par les survivant(e)s et complète les efforts pour prévenir les violences sexuelles, faire justice et fournir des soins holistiques.

Le Mali connaît une crise multiforme depuis plusieurs années et les femmes sont toujours en première ligne des victimes sous toutes ses formes. Fort de cela, le gouvernement du Mali, à travers des structures autonome ou semi-étatique, multiplie les stratégies de réparation. C’est le cas notamment de Global Survivor Fund. Selon le directeur Pays d’ASFC, Dr Aristide NONONSI, les violations contre les femmes ont été instrumentalisées par les différents protagonistes du conflit qui sévit au Mali depuis des années. Il estime aussi que les femmes tout comme les enfants sont souvent utilisés comme boucliers pour porter atteinte à l’autre.

De son côté, le président de la CVJR, Ousmane Oumarou SIDIBE, s’est réjoui de la tenue de cette table ronde spécifique sur les voies et moyens de réparation des femmes ayant été victime de violences sexuelles. «Dans nos deux premières audiences publiques, les femmes représentent plus de la moitié des cas de déposition à travers nos différentes antennes. En matière de violence, les femmes sont toujours en première ligne parce qu’elles en subissent les conséquences de n’importe quelle violence. Que ça soit commis sur l’homme ou sur l’enfant, la femme subit plus de conséquences et dans beaucoup de cas, les femmes elles-mêmes sont visées », souligne-t-il.

Dans son discours d’ouverture, la représentante du ministère de la réconciliation nationale, le Lieutenant Colonel Fatoumata Bintou Sangaré, a félicité les initiateurs de cette table ronde avant de faire part de la préoccupation du gouvernement vis-à-vis de la thématique, car selon elle, les violences sexuelles sont majoritairement utilisées comme armes de guerre ou moyens de torture et de terreur. «Les victimes de ces violences sont meurtries dans leurs âmes et dans leur dignité. C’est au regard de l’ampleur des conséquences de ce phénomène qui sont souvent irrévocables, que le Conseil de Sécurité a adopté le 23 avril 2019 la Résolution 2467 en mettant ainsi en relief l’importance d’une approche centrée sur les besoins des victimes à travers des réparations et d’autres mesures judiciaires. Cette résolution vient ainsi consolider celles qui l’ont précédée, notamment les 1325, 1820, 1888 ,1960, 2106, 2122 et 2242, afin de mettre au centre des intérêts les besoins sociaux, psychologiques et physiques des victimes de ces atrocités », explique-t-elle.

Aussi, la conseillère technique a précisé que le Mali, dans un conflit anti-terroriste depuis un certain temps, ne peut pas être en marge de cette dynamique internationale face à une situation qui nous interpelle tous. «En effet, depuis quelques années, le Mali avec les autres pays du G5 Sahel font face à une situation d’insécurité aggravée par plusieurs facteurs tels que la présence des groupes armés terroristes ; la prolifération d’armes légères ; les tensions communautaires… Il a été constaté que la violence à l’égard des femmes et des filles connait une recrudescence sans précédent, notamment dans les régions du centre et du nord où celles-ci subissent des dures épreuves », ajoute-t-elle.

Le Lieutenant Colonel Fatoumata Bintou Sangaré estime que les recommandations issues de cette table ronde sont cruciales afin de mieux orienter les prises d’initiatives à l’égard des victimes. «Il est incontestable que la réparation, dont les victimes des violences ont droit, est l’une des conditions pour assoir une paix durable. C’est pour cette raison que nous accordons une attention particulière à des initiatives de ce genre qui permettent non seulement à ceux qui ont la charge de réparer d’exposer leurs ambitions et leurs limites en la matière, mais aussi de donner la parole aux survivantes de violences sexuelles pour exprimer leurs préoccupations et leurs attentes », a insisté le Lieutenant Colonel Fatoumata Bintou Sangaré.

Amadou Kodio / Afrikinfos-Mali