Deux ans après la 72ème Assemblée Mondiale de la Santé tenue en 2019 à Genève, le Mali a réussi à élaborer, avec le soutien de ses partenaires techniques et financiers, un plan d’actions pour la mise en œuvre des engagements qu’il a pris concernant l’accès universel aux services d’eau, d’hygiène et d’assainissement dans les établissements de soins d’ici à 2030.
A la 72ème Assemblée Mondiale de la Santé, tenue à Genève du 20 au 28 mai 2019, les ministres en charge de la santé des pays membres ont adopté une résolution spécifique relative à l’Eau Potable, l’Hygiène et l’Assainissement (WASH) en milieu de soins. C’est une résolution qui engage les Etats à redoubler d’efforts pour parvenir à un accès universel d’ici à 2030.
Cette résolution concerne onze engagements. Il s’agit entre autres : de mener des évaluations complètes afin de quantifier la disponibilité, la qualité et les besoins concernant les services d’eau, d’hygiène et d’assainissement (WASH), Prévention et Contrôle des Infections (WASH/PCI) dans les établissements de santé ; d’élaborer et de mettre en œuvre une feuille de route de mise à niveau WASH/PCI des établissements de santé ; de fixer des cibles à atteindre dans les politiques de santé et d’intégrer les indicateurs relatifs aux WASH/PCI dans les mécanismes de suivi nationaux ; d’harmoniser les stratégies et les approches aux initiatives mondiales sur le WASH en milieu de soins et contribuer aux objectifs de développement durable (ODD 3 et 6) de mettre en place un mécanisme de financement durable des services WASH/PCI dans les établissements de santé ; de mettre en place des mécanismes solides de coordination multisectorielle.
Ce qui a été fait…
Selon Moussa Ag Hamma, sous-directeur de la direction générale de la santé et de l’hygiène publique, le Mali a élaboré depuis 2020 un plan d’actions de mise en œuvre de tous les onze engagements. «C’est un plan d’actions qui s’étend sur trois ans et qui sera évalué», précise-t-il.
Pour ce qui concerne les évaluations complètes afin de quantifier la disponibilité, la qualité et les besoins concernant les services WASH dans les établissements de santé, Moussa Ag Hamma nous informe de la disponibilité des résultats de l’évaluation rapide complète (2014-2016) et la réalisation d’évaluation partielle par les projets pilotes (Kolokani, Bla, Koro, Niono, Markala, Sikasso, Kéniéba, Koutiala) entre 2016 et 2020. Pour l’établissement et l’application des normes minimales WASH/PCI et les intégrer dans un système d’accréditation et de réglementation, le Mali, selon Moussa Ag Hamma, a fait des progrès à travers l’initiative ‘’paquet minimum WASH en milieu de soins’’ et le ‘’Guide opérationnel Hard(infrastructures) et Soft (communication, outils…). C’est une approche ‘’centre de santé propre’’ qui a concerné le District de Bamako et les six districts sanitaires de Koulikoro.
Dans la même dynamique, le Mali travaille à fixer les cibles à atteindre dans les politiques de santé et à intégrer les indicateurs relatifs aux WASH/PCI dans les mécanismes de suivi nationaux. A ce niveau, le paramétrage des indicateurs WASH dans le DHIS 2 District Health Information System 2 (DHIS2) est déjà effectif et il reste à mettre à jour les outils et opérationnaliser la collecte.
En ce qui concerne la mise en place d’un mécanisme de financement durable des services WASH/PCI dans les établissements de santé, Moussa Ag Hamma affirme que le plan stratégique WASH en milieu de soin est élaboré et validé pour 2017-2021, aussi bien que le plan d’action 2020-2023 qui a besoin de mise à jour de cibles pour combler les GAP nationaux conforme au Paquet Minimum WASH. A cela, s’ajoutent l’élaboration et la mise en œuvre d’une feuille de route de mise à niveau WASH/PCI des établissements de santé pour 2020-2023. Là aussi, Moussa Ag Hamma soutient que cette feuille de route nécessite une mise à jour de cibles pour combler les GAP nationaux conforme au Paquet Minimum WASH.
S’agissant de l’intégration des services WASH/PCI dans les programmes de santé, y compris ceux relatifs à la nutrition, la santé de la mère, de l’enfant et du nouveau-né, la Résistance aux anti-microbiens, la qualité des soins et la couverture sanitaire universelle, le Mali, selon Moussa Ag Hamma, a fait des progrès à travers l’intégration du WASH dans le plan d’action multisectoriel nutrition (Paquet minimum WASH) et dans celui de la Santé de la reproduction/ nouveau né/enfant/nutrition et de la Résistance aux anti-microbiens.
Pour la mise en place des mécanismes solides de coordination multisectorielle, Moussa Ag Hamma annonce l’instauration du système Task Force WASH en milieu de soins mis en place et opérationnel. En ce qui concerne
l’harmonisation des stratégies et approches aux initiatives mondiales sur le WASH en milieu de soins et contribuer aux ODD 3 et 6, le Mali a déjà adopté le WASH FIT au niveau national. Actuellement appliqué au niveau d’une centaine d’établissements de santé dans les régions de Koulikoro, Ségou, Mopti et du district de Bamako, ce mécanisme, selon Moussa Ag Hamma, a besoin de mise à jour conformément à l’allégement en fonction des petits établissements et la résilience au changement climatique. Dans ce même plan d’actions, il faut signaler l’harmonisation des indicateurs WASH en milieu de soins à ceux de Joint Monitoring Programme (JMP).
Enfin, pour l’élaboration et la mise en œuvre d’une feuille de route de mise à niveau WASH/PCI des établissements de santé, le Mali a déjà élaboré un plan d’actions qui s’étend sur 2020-2023.
Ce qu’il faut retenir, c’est que pour atteindre tous ces objectifs fixés, le sous-directeur de la direction générale de la santé et de l’hygiène publique, Moussa Ag Hamma et ses collaborateurs précisent : «Nous avons besoin de plus de mobilisation pour répondre aux attentes. Ce qui passera forcement par l’intégration du wash en milieu de soins dans les différents programmes y compris le financement, dans les instances de gestion à tous les niveaux et dans la mobilisation accrue des partenaires techniques et financiers y compris à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). »
«Le Mali a très bien démarré »
Selon Sory Ibrahima Bouaré de l’OMS, il y a l’espoir que Mali mette en œuvre tous les engagements dans le délai. «L’OMS est à la fois partenaire technique et financier et elle fait également des plaidoyers auprès de ses différents partenaires pour l’exécution de ce plan d’actions élaboré dans le cadre de la mise en œuvre desdits engagements. C’est dans ce cadre que WaterAid appuie l’OMS durant ces trois années à venir avec 100 mille dollar », souligne-t-il.
Sory Ibrahima Bouaré précise également que l’OMS s’est engagée à appuyer le suivi des indicateurs WASH intégrés dans le système de santé. «Des indicateurs clés ont été définis et paramétrés qui doivent être insérés dans les DHIS2. Egalement, l’un des points concernaient l’outil d’amélioration, il fallait avoir un système standard d’amélioration de la situation WASH au niveau du milieu de soin. Il s’agit aussi de WASH FIT qui est un outil d’amélioration de la qualité des services WASH au niveau des structure de santé. L’OMS a introduit cet outil à travers la formation des formateurs. Ce qu’on a pas pu faire et qui nous tient à cœur, c’est l’évaluation de la situation de base. L’UNICEF s’était engagé, en son temps, à le faire, mais la COVID 19 a ralenti les choses. Aujourd’hui, je crois que le dossier est en cours de déblocage », souligne-t-il
A la question de savoir si le Mali a bien démarré, deux ans après la signature de ces engagement, Sory Ibrahima Bouaré répond : «Le Mali a très bien démarré. On a déjà un document standard. On a le Paquet Minimum WASH ; on a également entamé l’intégration des indicateurs WASH dans le système national de santé ; on a l’outil WASH FIT introduit au Mali ; on est également sur l’évaluation de la situation de base. On a vraiment fait des progrès.»
Au niveau de WaterAid, il faut toujours accentuer les plaidoyers. Selon le chargé de programme de WaterAid Mali, Mahamane Touré, WaterAid prévoit de faire un plaidoyer pour que ce plan soit mis en œuvre et à bonne date. «Pour le respect de ces engagements pris par le Mali, nous avons prévu d’appuyer la mise en œuvre du plan d’action de la résolution mondiale de santé. WaterAid prévoit également de faire un plaidoyer pour que ce plan d’actions soit effectivement mis en œuvre et pour veiller à ce que l’Etat respect ses engagements. En dehors du plaidoyer, nous avons dit qu’il faut aussi montrer l’exemple. C’est pourquoi WaiterAid va appuyer financièrement l’OMS pour la réalisation de certaines actions inscrites dans ce plan », précise-t-il.
Selon Mahamane Touré, le Mali a pris un bon départ en élaborant un plan. «On a également des acquis sur certains engagements. Mais, ça fait plus d’un an qu’on n’a pas pu se réunir. On avait prévu deux rencontres cette année, mais malheureusement la direction générale de la santé et de l’hygiène publique n’a pas été très disponible. Mais l’année à venir, on compte bien tenir une réunion pour se situer sur le niveau de mise en œuvre du plan. Sinon, il y a déjà des acquis », ajoute-t-il.
Des réalités du terrain
Au-delà de ces actions annoncées de part et d’autre, les réalités sur le terrains restent quasiment déplorables. A l’hôpital du Point G tout comme à l’hôpital Gabriel Touré, les déchets solides et liquides cohabitent avec le personnel et les patients dans certains endroits. Aussi, dans les toilettes publiques, les conditions d’hygiène ne sont pas respectées.
Joint par téléphone, Djimé Kanté, porte-parole du syndicat des travailleurs du Centre hospitalo-universitaire Gabriel Touré précise que le problème d’eau ne se pose plus. «A Gabriel Touré, il n’y a pas de problème d’eau. En plus de la desserte de la Société Malienne de Gestion de l’Eau Potable (SOMAGEP-SA), il y a également des particuliers qui ont réalisé des forages d’eau ici à l’hôpital Gabriel Touré. Au total, nous en avons trois. Donc, l’ensemble de ces installations permet de combler les besoins en eau à l’hôpital.»
En terme d’hygiène, le porte-parole du syndicat des travailleurs du Centre hospitalo-universitaire Gabriel Touré estime qu’il y a encore des gros efforts à faire. «C’est vrai, suite aux différents mouvements du syndicat, il y a un début de solution qui a été trouvé, mais il y a encore des gros efforts à faire. La question concerne les matériels biomédicaux, les matériels d’opération, la disponibilité des gants…Et comme je le disais, il y a encore des gros efforts à faire à ce niveau », souligne-t-il.
Parlant de l’assainissement, Djimé Kanté a témoigné : « Pendant l’hivernage, l’hôpital Gabriel Touré est pratiquement inondé. Et même les eaux usées des toilettes sont encore visibles à l’intérieur de l’hôpital. A ce niveau aussi, des efforts ont été faits, mais ce n’est pas suffisant. »
Certes, ce plan d’actions connait un début d’exécution, mais au rythme actuel, il est important pour le Ministère de la Santé de mettre le pied sur l’accélérateur pour que le Mali soit au rendez-vous de 2030, c’est-à-dire, atteindre l’accès universel à l’hygiène.
Ousmane BALLO / Afrikinfos-Mali
Last Updated on 10/12/2021 by Ousmane BALLO